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Épisode 10 – Jérôme, la Lorraine et le Saint-Empire (Passion Modernistes)

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Épisode 10 - Jérôme, la Lorraine et le Saint-Empire (Passion Modernistes)
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Quelle est la place du duché de Lorraine par rapport au Saint-Empire au XVIIIème siècle ?

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En juin 2019, Jérôme Jacobé a soutenu un mémoire sur « Le duché lorrain et sa pratique de l’appartenance impériale à travers la diplomatie » à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne, sous la direction de Christine Lebeau.

Un duché de Lorraine entre deux grands pouvoirs

A la fin de la guerre de la Ligue d’Augsbourg (1688-1697), le duc de Lorraine Léopold retrouve ses duchés qui ont été annexés par la monarchie française depuis le milieu du XVIIème siècle. Au début de la guerre de Succession d’Espagne (1701-1714), le prince lorrain tente de maintenir une stricte neutralité à l’égard de ses deux parents que sont Louis XV et l’Empereur Léopold.

Néanmoins, cela ne l’empêche pas de formuler de vastes projets diplomatiques en lien avec ses revendications successorales sur le duché de Montferrat. A travers l’étude d’un de ses envoyés extraordinaires à la diète de Ratisbonne, Jérôme Jacobé a travaillé sur comment le duché lorrain a tâché de rappeler son appartenance au Saint-Empire. Celle-ci est certes ambiguë mais s’appuie sur une multitude de liens et de définitions juridiques floues utilisée à dessein afin de se présenter comme membre de l’Empire pour obtenir une protection diplomatique.

Léopold Ier duc de Lorraine
Léopold Ier duc de Lorraine

Un envoyé extraordinaire

La trajectoire de Gaspard de Henckelman, l’envoyé extraordinaire de Léopold Ier et l’étude des documents juridiques permettent de comprendre comment se construit à travers la diplomatie une pratique de l’appartenance impériale originale. Elle est cependant caractéristique de cet ensemble complexe qu’est le Saint-Empire où se juxtaposent plusieurs types de droits et des princes possédant différents statuts.

Pour en savoir plus sur cet épisode Jérome vous conseille les lectures suivantes :
  • GANTET Claire, LEBEAU Christine, Le Saint-Empire (1500-1800), Paris, Armand Colin, 2018. NOEL
  • Jean François, Le Saint-Empire, Paris, PUF, 1986
  • BRETSCHNEIDER Falk, DUHAMELLE Christophe, Le Saint-Empire, histoire sociale, Paris, Fondation de la Maison des Sciences de l’Homme, 2018.
  • BRAUN Guido, La connaissance du Saint-Empire en France 1643-1746, Munich, R. Oldenbourg Verlag, 2010.
  • BRAUN Guido, Du Roi-Soleil aux Lumières : l’Allemagne face à l’Europe française (1648-1789), Villeneuve-d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2012.

Sur la Lorraine :

  • VIGNAL SOULEYREAU Marie-Catherine, Richelieu et la Lorraine, Paris, L’Harmattan, 2004.
  • MOTTA Anne, Noblesse et pouvoir dans la Lorraine ducale (1624-1737), Paris, Classiques Garnier, 2015.
  • MOTTA Anne (dir.), Échanges, passages et transferts à la cour du duc Léopold (1698-1729), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2017.
  • MCCLUSKEY Phil, Absolute monarchy on the frontiers : Louis XIV’s military occupations of Lorraine and Savoy, Manchester, Manchester-University Press, 2013. `
  • BABEL Rainer, Zwischen Habsburg und Bourbon, Sigmaringen, J. Thorbecke, 1989
Carte simplifiée du Saint-Empire romain germanique
Carte simplifiée du Saint-Empire romain germanique

Sur les relations internationales : 

  • BELISSA Marc, « Diplomatie et relations ‘internationale’» au 18e siècle : un renouveau historiographique ? » , Dix-huitième Siècle, N°37, 2005. pp. 31-47.
  • BELY Lucien, Les relations internationales en Europe XVIIe et XVIIIe siècle, Paris, PUF, 2007.
  • BELY Lucien, L’invention de la diplomatie, Paris, PUF, 1998.
  • BELY Lucien, L’art de la paix en Europe : naissance de la diplomatie à l’époque moderne, XVIe-XVIIIe siècle, Paris, PUF, 2007.
  • GANTET Claire, Guerre, paix et construction des États, Paris, Seuil, 2003.
Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :
Les extraits diffusés dans cet épisode :
Transcription de l’épisode 10 (cliquez pour dérouler)

Fanny : Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode de Passion Modernistes. Dans ce podcast, nous vous proposons de rencontrer de jeunes chercheurs et chercheuses en master ou en thèse qui étudient l’histoire moderne. Et pour rappel, l’histoire moderne c’est cette période qui s’est glissée entre le Moyen Âge et l’époque contemporaine, c’est-à-dire en gros, pour l’Europe occidentale, entre les années 1500 et 1800.

Épisode 10 — Jérôme, la Lorraine et le Saint-Empire, c’est parti !

Bonjour Jérôme Jacobé.

Jérôme : Bonjour Fanny, bonjour à tous.

Fanny : À l’heure on enregistre ce podcast, tu viens de soutenir ton mémoire de deuxième année de master, il y a seulement, quoi, même pas quelques jours. Félicitations !

Jérôme : Merci beaucoup. Oui c’était il y a une semaine et demi, deux semaines peut-être, ça passe vite maintenant.

Fanny : Ça va, le stress est un peu redescendu ?

Jérôme : Le stress est redescendu, c’est pas plus mal.

Fanny : Tant mieux. Donc, tu as fait ce master à l’Université Paris 1 — Sorbonne, sous la direction de Christine Lebeau, et ton mémoire portait sur le duché lorrain et sa pratique de l’appartenance impériale à travers la diplomatie. Il y a plein de mots clés intéressants dans ce titre…

Jérôme : Oui, on aura le temps d’en reparler.

Fanny : On va détailler un petit peu tout ça. On va le voir, tu as travaillé sur la Lorraine, le duché de Lorraine et le Saint-Empire. Donc, est-ce que tu peux nous dire à quelle période on est exactement, sur quelle période tu as travaillé ?

Jérôme : On se trouve durant la période de la guerre de Succession d’Espagne. C’est la guerre qui marque la fin de ce qu’on a appelé le cycle de guerre louis-quatorzien. C’est donc un affrontement entre la monarchie française, l’Espagne, et l’Empire, nous y reviendrons. Le contexte européen à cette époque est marqué par, notamment, une crainte de ce qu’on a appelé la monarchie universelle. C’est un principe qui a réglé les relations dites internationales. Alors, il faut prendre du recul avec ce terme de relations internationales, bien sûr c’est une commodité [NdT : de langage], pour désigner les relations entre princes, les relations interétatiques si on veut. Cette crainte de la monarchie universelle va se retrouver dans le problème de la succession d’Espagne. On l’a déjà entendu dans le podcast Passion Modernistes, avec Camille qui parlait notamment de ce roi, Charles II [d’Espagne], qui va mourir et n’a pas de descendance. Le contexte est marqué par un nouveau conflit entre la France et le Saint-Empire, et c’est à ce moment-là où la Lorraine va chercher à tirer un peu son épingle du jeu, dans cette rivalité entre France et Empire. Concernant le contexte, maintenant, plus spécifique du Saint-Empire, c’est à la veille de la guerre de Succession d’Espagne, et durant toute l’époque moderne, un espace très complexe. C’est un héritage médiéval, un héritage féodal, qui est né avec Otton II [1er] en 962 bien sûr et qui est très complexe. Pour faire simple, il y a des exceptions et des particularités pour absolument chaque définition et pour chaque règle du Saint-Empire, et c’est ce qui fait un peu son charme.

Fanny : Le Saint-Empire, c’est, on dirait aujourd’hui, en gros l’espace allemand, à peu près ?

Jérôme : Alors, c’est plus grand que l’espace allemand, en gros il s’étend… alors on peut le dire de la Lorraine d’ouest en est jusqu’à la Bohême, et du sud au nord, on va dire de l’Italie, ce qu’on appelle l’Italie impériale, tous ces petits États qui sont situés dans la plaine du Pô, avec l’espace de Milan et d’autres, jusqu’au nord la mer Baltique et la mer du Nord. C’est vrai que c’est très compliqué parce que pour simplifier à l’extrême, il faut distinguer deux niveaux de pouvoir dans le Saint-Empire, celui de l’empereur et celui des autres membres de l’Empire. Et donc ma question, la question de mon mémoire, tourne autour de qui sont ces membres de l’Empire. C’est-à-dire qu’on sait que l’Empereur est élu par sept électeurs puis huit puis neuf au fil des siècles, et il règne donc sur l’Empire, et aussi sur ses États héréditaires. Le reste de l’Empire est composé, et c’est là tout le souci, d’une multitude de membres qui ont des statuts divers voire même pléthoriques, et c’est à partir de là que mon sujet a commencé à s’esquisser, puisqu’il y a tellement de statuts qu’on a parfois du mal à dire qui fait partie ou non de l’Empire. On le verra, c’est particulièrement vrai pour des espaces qui sont périphériques à l’Empire. Notamment, parmi ces membres, on peut compter les électeurs tout d’abord, et ensuite les principautés, les villes dites « villes immédiates d’Empire ». En fait, il y a un seul principe qui peut être retenu pour définir le Saint-Empire, c’est que les membres de l’Empire sont [vassaux] de l’Empereur.

Fanny : Oui, ça me semble logique effectivement.

Jérôme : Et c’est à partir de là ensuite que naissent les difficultés. Concernant le contexte lorrain, c’est d’abord un territoire qui est tout aussi complexe, à plus grande [NdT : petite] échelle, que le Saint-Empire, où il y a aussi un enchevêtrement de territoires. C’est moins important pour la compréhension de mon sujet, mais pour donner une idée de ce qu’on appelle la Lorraine, elle est en réalité composée, certes des duchés lorrains, mais aussi des Trois-Évêchés, c’est-à-dire Metz, Toul et Verdun, qui sont de facto à la monarchie française depuis le milieu du XVIe siècle, et de jure depuis les Traités de Westphalie de 1648. Mais la Lorraine est aussi composée des duchés de Bar, c’est-à-dire ce qu’on appelle le Barrois qui est dit mouvant, qui relève de la mouvance française, c’est-à-dire que les ducs lorrains restent vassaux du roi de France pour le Barrois mouvant, et le Barrois dit-non mouvant. La Lorraine est aussi un espace où se multiplient des territoires aux statuts divers. C’est important parce que tous ces titres donnent des droits différents qui permettent d’agir dans les relations dites internationales. Alors, là le contexte politique est plus simple. Il y a eu une question lorraine tout le long du XVIIe siècle. Elle a été occupée à deux reprises : en 1633 jusqu’en 1661, et une nouvelle fois à partir de 1670. Ce n’est qu’à partir de la fin d’une des guerres de Louis XIV, la guerre de la Ligue d’Augsbourg, ou encore la guerre de Neuf ans, que le duc Léopold va retrouver ses duchés en 1697. Et peu de temps après, donc comme je l’ai dit, va apparaître la guerre de Succession d’Espagne en 1702. Les ducs ont été, durant tous ces exils, dans l’Empire, et Léopold 1er de Lorraine arrive en Lorraine en 1698.

Fanny : Donc c’est vraiment une situation on voit assez compliquée. Je trouve que c’est assez révélateur de ce qu’il se passe à l’époque moderne pour toute l’Europe en fait, il y a tellement de conflits, de couches différentes selon les alliances, qu’effectivement ça donne un truc très compliqué. Donc, on va le voir, toi tu as étudié comment la Lorraine peut être rattachée ou non, je schématise un peu, au Saint-Empire. Déjà, j’avais une petite question toute simple, pourquoi la Lorraine est un duché ?

Jérôme : La Lorraine est un duché, c’est-à-dire qu’auparavant, c’était un duché qui était pleinement dans l’Empire, jusqu’en 1542, et les ducs de Lorraine ont pris le titre de duc, enfin les seigneurs de la maison de Lorraine ont pris le titre de duc, et leurs pouvoirs se sont accrus au fil des siècles. Il y a eu une sorte peut-être d’apogée, notamment avec René II de Lorraine, qui notamment a vaincu Charles le Téméraire, à la bataille de Nancy à la toute fin du XVe siècle.

Fanny : Pour rappel, dans l’épisode 1 du podcast, nous avions déjà parlé de la Lorraine avec Sophie, à propos de Gaston d’Orléans, donc les auditeurs et auditrices, ça va peut-être vous rappeler quelque chose. Pourquoi tu as voulu étudier la Lorraine et le Saint-Empire sous cet angle-là, qu’est-ce qui t’a intéressé, et qu’est-ce que tu as voulu montrer dans ton mémoire ?

Jérôme : Alors, il y a toujours une grande part de hasard dans la construction d’un sujet de recherche…

Fanny : Ah bon ?

Jérôme : Oui, je pense, on tombe toujours sur des documents qu’on ne pensait pas avoir…

Fanny : C’est la magie de l’époque moderne, vous avez trop de sources !

Jérôme : Alors, c’est vrai qu’on en a beaucoup, plus qu’en histoire médiévale. Le sujet s’est élaboré avec ma directrice de recherche Christine Lebeau, qui m’a demandé, en fait qui m’a donné un cahier des charges, véritablement assez large, m’a demandé d’aller voir dans les archives de Lorraine, qui se trouvent à Nancy. Les archives du duché de Lorraine sont dans les archives départementales de Nancy. Donc elle m’a demandé de trouver des documents qui mettaient en lien la Lorraine et le Saint-Empire, qui concernaient les relations entre le duché et l’Empire.

Fanny : Elle a voulu faire ça parce que ça n’avait pas été trop étudié, qu’elle avait une piste, pourquoi elle voulait que tu ailles faire ça ?

Jérôme : Elle s’intéressait aux marges, à la périphérie de l’Empire, et à ce moment-là elle écrivait un manuel, et c’est vrai que le « cas lorrain », elle le savait, elle le présentait, était tout à fait particulier, dans ses relations avec l’Empire. Je suis tombé sur trois cartons d’archives. Enfin, je suis tombé, c’est-à-dire que j’ai pris les index des archives, et recherché tous les documents dans les noms de cartons qui pouvaient avoir trait à ces relations entre la Lorraine et le Saint-Empire. Et je suis tombé sur trois cartons de documents, qui conservent en fait une seule correspondance, une correspondance de 650 lettres d’un diplomate qui est envoyé à la diète de Ratisbonne.

Fanny : À la quoi ?

Jérôme : À la diète de Ratisbonne.

Fanny : C’est quoi la diète de Ratisbonne ?

Jérôme : Oui, bien sûr. C’est l’instance, une institution du Saint-Empire, il y en a plusieurs, mais c’est une institution qui en gros regroupe les représentants, à partir de 1648, les représentants de tous les membres de l’Empire, tous les princes de l’Empire, avec le représentant de l’Empereur, qui discutent et prennent des décisions, ce qu’on appelle des recès d’Empire, à la fin, des délibérations qui ont une valeur constitutionnelle pour le Saint-Empire.

Fanny : Donc dans les lettres de ce monsieur, tu as vraiment eu un aspect de ce qui se passait dans cette instance-là, donc ça a dû vraiment t’intéresser pour ton sujet.

Jérôme : Alors, c’est un peu arbitraire, mais je me suis dit que dans ces 650 lettres j’aurais les informations dont j’aurais besoin. Et, c’est un diplomate, qui s’appelle Gaspard de Henckelman, envoyé donc à la diète de Ratisbonne, de 1707 à 1714, donc pendant la guerre de Succession d’Espagne. À partir de ce moment-là, j’ai essayé de comprendre qui il était, pourquoi il était envoyé à la diète de Ratisbonne, à quelle finalité, et pour quelle raison. C’est à partir de là que j’ai rajouté des documents et je suis retournée voir donc ma directrice de recherche, au tout début de mon M1, puisqu’on avait convenu de ce cahier des charges à la fin de la L3, comme ça se fait souvent, et je lui ai proposé de travailler sur ce diplomate, et les raisons pour lesquelles il était envoyé en Empire.

Fanny : Alors, Jérôme, qu’est-ce que tu as trouvé dans ces lettres qui t’a aidé à comprendre les relations entre la Lorraine et le Saint-Empire ?

Jérôme : Alors mon sujet a beaucoup évolué, parce qu’on se rend compte que 650 lettres c’est beaucoup quand même.

Fanny : Ah bon ? [rires partagés] c’est fou dis donc …

Jérôme : Et donc en deux ans, parce que maintenant les sujets se font de plus en plus en deux ans, on fait un bilan d’étape en première année, donc mon sujet a beaucoup évolué, les problématiques ont beaucoup évolué, pendant plusieurs mois sur les deux années de cette recherche. D’abord donc j’ai compris qu’il était envoyé à la diète de Ratisbonne pour négocier tout d’abord, négocier quoi, négocier en réalité, enfin rechercher plutôt la protection de l’Empire. C’est-à-dire que Léopold Ier de Lorraine a envoyé un représentant extraordinaire, Gaspard de Henckelman est un représentant extraordinaire, il y a dans la diplomatie moderne plusieurs hiérarchies de diplomates…

Fanny : Donc c’est un titre particulier, être un envoyé extraordinaire ?

Jérôme : Oui, tout à fait. Alors, extraordinaire ça veut dire qu’il n’est pas ordinaire par rapport à d’autres…

Fanny : Oui…

Jérôme : …qu’il est envoyé peut-être en plus d’un autre. Il y a une hiérarchie des diplomates dans la diplomatie moderne, il y a des diplomates, des représentants plénipotentiaires, des envoyés ordinaires, des envoyés extraordinaires. Donc lui c’est-à-dire qu’il est envoyé pour une mission bien spécifique.

Fanny : C’est un agent secret du duc de Lorraine, mais pas si secret que ça ?

Jérôme : Alors presque, on y reviendra parce que sa mission est complémentaire à celle d’un autre envoyé, qui d’ailleurs permet de bien comprendre le statut de la Lorraine, vis-à-vis du Saint-Empire. Et donc son rôle est de rechercher la protection impériale. Une protection qui donc n’est pas militaire mais une protection diplomatique.

Fanny : Et pourquoi il recherche cette protection ? Ils en avaient besoin, le duché de Lorraine était un peu en galère ?

Jérôme : Tout à fait. Pendant la guerre de Succession d’Espagne, Léopold 1er de Lorraine a demandé une neutralité, comme souvent. C’est-à-dire que donc la monarchie française et l’Empire s’opposent donc pour obtenir la succession d’Espagne. Philippe V a été mis sur le trône d’Espagne parce que le testament de Charles II faisait du duc d’Anjou l’héritier de l’Espagne et de toutes ses possessions, c’est ce qui déclenche la guerre de Succession d’Espagne, et la Lorraine ne souhaite pas prendre parti dans cette guerre.

Fanny : La Lorraine se retrouve en sandwich entre la France et le Saint-Empire…

Jérôme : C’est ça. C’est ce qu’on dit souvent, la Lorraine est dans une position d’entre-deux, entre les deux puissances que sont la monarchie française et le Saint-Empire. Donc elle revendique une neutralité. Or, dans le même temps, lorsque la guerre a débuté, des alliances se sont formées. Et Charles II, duc de Mantoue et de Montferrat, a pris le parti de la France. Ce prince va être mis au ban de l’Empire et va mourir sans descendant. Comme en Espagne, c’est-à-dire que comme Charles II [d’Espagne], il n’y a pas de descendant pour les Gonzague. Pour Charles II de Gonzague, eh bien l’héritier le plus proche se trouve être le duc de Lorraine.

Fanny : Ah oui, donc là il se retrouve mêlé malgré lui dans une mini guerre de succession.

Jérôme : Alors, il n’y a pas de guerre de succession…

Fanny : Un conflit ?

Jérôme : Oui, bien sûr il y a un conflit puisque le duc de Savoie était lui aussi allié.

Fanny : Encore un ! Encore un personnage !

Jérôme : Oui, encore un autre protagoniste. Il était allié d’abord à la monarchie française. Or il va se ranger du côté de la Grande Alliance, l’alliance entre l’Empire et les puissances maritimes c’est-à-dire l’Angleterre et les Provinces-Unies. L’empereur va en réalité promettre le duché de Montferrat et de Mantoue au duc de Savoie s’il se rallie à la Grande Alliance. C’est pour ça que, en quelque sorte, Léopold 1er de Lorraine est spolié de ses droits sur le Montferrat.

Fanny : Oui, mais il a pas voulu trop râler parce qu’il voulait pas se mettre le Saint-Empire à dos ?

Jérôme : Est-ce qu’il a râlé ? Peut-être pas tout à fait, mais en réalité, cette revendication dynastique va lui permettre de construire des projets diplomatiques et politiques. À partir de cette revendication, on va lui promettre une indemnisation territoriale, comme ça se fait souvent quand les droits d’un prince sont lésés, c’est-à-dire qu’on va lui promettre une indemnité équivalente au duché de Montferrat et de Mantoue. À partir de là, il va avoir un projet politique qui va être de reconstituer ce qu’il appelle, et ce que les contemporains appellent, la grande Lotharingie. Ce qui est en fait…

Fanny : Ooh… oh, du Moyen Âge ! Ça me plait, ça !

Jérôme : C’est ça, on reconstituerait un grand-duché de Lorraine qui servirait de barrière. De barrière, qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire, là aussi à gros traits, mais [une sorte] d’État tampon entre la France et l’Empire, sur le même principe qu’il existe une barrière, à peu près à la même époque, entre la France, une barrière pour les Provinces-Unies, entre la France et les Provinces-Unies.

Fanny : Spoiler : est-ce qu’il a réussi ?

Jérôme : Eh non.

Fanny : Oh, zut ! On va voir ça. Donc quand il envoie cet envoyé extraordinaire, il espère réussir à obtenir du Saint-Empire, en gros « c’est bon les gars en fait je veux bien être ami avec vous » pour consolider son duché, c’est ça ?

Jérôme : C’est à dire qu’il reste neutre dans la guerre, mais il va espérer secrètement une défaite de la France, de la monarchie française.

Fanny : Tu vois, j’avais raison, il y a un peu de secret là-dedans.

Jérôme : C’est ça, non mais tout à fait. Il faut un peu reconsidérer cette neutralité lorraine. Alors, certes, militairement il est neutre. Ses duchés sont occupés, il faut dire par… c’est-à-dire que la capitale du duché de Lorraine, Nancy, est occupée par la monarchie française, c’est à partir de ce moment-là que la Cour et le duc se déplacent à Lunéville. C’est pour ça qu’aujourd’hui on a le château de Lunéville, puisque c’est à cette époque-là que Léopold de Lorraine s’est réfugié, s’est retiré à Lunéville. Cette neutralité, en réalité donc il espérait la défaite française, et cette protection impériale. C’est pourquoi j’ai intitulé mon mémoire également comme ça, « à l’ombre de la protection impériale ». Cette protection impériale résidait dans le fait d’obtenir une assurance de l’Empire, c’est-à-dire que la délégation impériale qui ira au congrès de paix — à cette époque les relations internationales et les guerres prennent fin par des congrès de paix — eh bien cette protection impériale doit résider dans le fait que la délégation de l’Empire et de l’Empereur revendiquera pour le duc de Lorraine cette indemnité du Montferrat qui permettra de créer une grande Lotharingie.

[Intermède musical]

Fanny : Et résultat, qu’est-ce qu’a réussi à obtenir, ou n’a pas réussi à obtenir cet envoyé extraordinaire ?

Jérôme : Il n’a pas réussi à obtenir ce qu’il espérait, c’est-à-dire la dictature d’un mémoire de protestation.

Fanny : Oh, là là là là, tu vas nous expliquer ça, moi j’ai rien compris.

Jérôme : C’est-à-dire que cette diète dont je parlais précédemment, c’est-à-dire cette espèce d’instance, avec tous les guillemets possibles, « parlementaire » fonctionne sur des « mémoires » qui sont faits en fait, comme aujourd’hui on a des projets de loi, entre autres, là on a des mémoires, qui sont transmis à ce qu’on appelle la dictature, parce qu’en fait à l’époque médiévale on devait dicter les mémoires pour qu’ils soient ensuite étudiés dans les trois collèges de la diète de Ratisbonne. Les trois collèges c’est une division de la diète entre le collège des princes électeurs, le collège des princes d’Empire, on retrouve un peu là ce que je disais…

Fanny : On mettra un schéma sur le site de Passion Modernistes pour expliquer ce système-là, si ça te va.

Jérôme : Oui bien sûr. Et le troisième collège, qui est le collège des villes immédiates d’Empire. Il espère en fait faire passer un mémoire qui garantisse le soutien de l’Empire pour la création d’une grande barrière dite de « protection », la grande Lotharingie, entre la France et l’Empire au bénéfice du duc Léopold. Il ne l’a pas obtenu, alors là spoiler c’est un peu la fin du mémoire, c’est-à-dire qu’à la fin l’ordre géopolitique, l’ordre international, l’ordre diplomatique est bouleversé par la mort de l’Empereur Joseph 1er, qui fait de Charles, son frère, l’archiduc Charles, l’héritier de l’Empire. Donc il [NdT : Charles] ne peut plus prétendre être le roi d’Espagne, puisqu’à la base c’était lui qui devait prendre à la succession de la monarchie espagnole, à la place du duc d’Anjou, c’est pour ça qu’on se battait. À partir de ce moment-là, cette crainte dont je parlais en introduction, cette crainte de la monarchie universelle, passait non plus du côté français entre une domination française et une domination espagnole dans une alliance dynastique, mais du coup, du côté de l’Empire puisque ça réactivait, entre autres, l’empire de Charles Quint. Et donc cette espèce de monarchie universelle, qui menaçait les intérêts des autres États européens.

Fanny : Ton mémoire s’arrête en quelle année et pourquoi ?

Jérôme : Je le fais arrêter en 1714, c’est la fin, en réalité, de la guerre de Succession d’Espagne, tous les traités de paix ont été passés entre les belligérants de cette guerre, et c’est un constat d’échec. Mon diplomate n’a pas réussi à obtenir ce qu’il voulait à la diète de Ratisbonne, donc tout simplement il n’y a pas eu de grande Lotharingie, ni de barrière. En fait on l’appelait la barrière du Rhin, c’est-à-dire cette barrière qui devait se placer entre la France et l’Empire.

Fanny : Et donc la Lorraine finit par être quoi finalement, elle reste un duché ?

Jérôme : Alors, la Lorraine reste un duché, oui, tout à fait. Léopold reste duc de Lorraine, mais n’agrandit pas son territoire comme il l’espérait, c’est en quelque sorte un échec du rapprochement avec l’Empire, mais d’un côté ce n’est pas un échec total puisqu’on sait qu’une fois que Léopold 1er mourra, ce sera donc son fils, François-Étienne, qui ira se marier avec Marie-Thérèse, et créera on le sait la dynastie des Habsbourg Lorraine.

Fanny : Il me semble que tu es toi-même de Lorraine c’est ça ?

Jérôme : Oui, c’est ça. J’ai commencé mes études à Nancy avant d’arriver en L3 à Panthéon — Sorbonne.

Fanny : Est-ce que ça te fait quelque chose de particulier de travailler sur la région d’où tu viens ? On voit plein de gens travailler sur des sujets qui n’ont rien à voir avec là d’où ils viennent, donc je trouve ça intéressant que tu aies fait ça.

Jérôme : Alors, là aussi c’était un peu un hasard. Quand je me suis rapproché de ma directrice de recherche, pour travailler sur le Saint-Empire, et elle-même qui savait que je venais de Nancy m’a en fait porté à travailler sur la Lorraine. Et c’est au fur et à mesure que j’ai vu qu’il y avait des problématiques presque pléthoriques dans ces relations entre la Lorraine et le Saint-Empire. Donc il n’y avait pas d’affinité particulière. Alors c’est toujours intéressant, au moins les sources étaient accessibles parce qu’il suffit de rentrer chez ses parents pour aller dans les centres d’archives, donc ça c’est toujours un plus.

Fanny : Oui, c’est ça. Tu n’as pas dû cavaler aux quatre coins de la France pour trouver des archives, c’était plus simple.

Jérôme : J’ai eu la chance d’aller à Vienne pour consulter les archives de Vienne, parce que…

Fanny : Ahh, sympa…

Jérôme : Oui, tout à fait, parce que beaucoup d’archives du Saint-Empire sont à Vienne, et notamment aussi tous les documents de la famille de Lorraine, une bonne partie, alors c’est-à-dire que comme je le disais François-Étienne de Lorraine va se marier avec Marie-Thérèse il va partir, pour faire simple, avec ses archives à Vienne. Donc encore aujourd’hui, même si les archives ont été restituées, on va dire au milieu du XXe siècle à Nancy…

Fanny : C’est gentil…

Jérôme : Y a encore une partie de plusieurs cartons qui reste à Vienne. Donc j’ai aussi pu aller compléter mon corpus documentaire à Vienne.

Fanny : Et justement, à part les lettres de cet envoyé, qu’est-ce que tu as étudié comme documents ?

Jérôme : Alors oui, j’ai rajouté beaucoup de documents, au fur et à mesure que mon sujet s’est précisé. C’est-à-dire que je ne travaillais plus tant sur les modalités de négociation à la diète de Ratisbonne, puisque c’est assez particulier, c’est-à-dire que la diplomatie moderne, souvent c’est un diplomate qui est à la cour d’un souverain. À la diète de Ratisbonne, c’est une sorte de congrès diplomatique permanent, avec plusieurs centaines de délégations. Finalement, en deuxième année de master, j’ai cherché plutôt à comprendre comment la Lorraine utilisait des liens juridiques et politiques flous dans ses relations avec le Saint-Empire. À partir de là, j’ai utilisé des documents plutôt juridiques. C’est-à-dire que je suis revenu en réalité sur ce qui définissait l’appartenance du duché de Lorraine au Saint-Empire. Et l’un de ces documents les plus fameux, c’est le traité de Nuremberg, qui acte la sortie de la Lorraine du Saint-Empire, puisque donc à l’époque médiévale, je le redis, ça ira mieux en le disant, la Lorraine était totalement d’Empire. Or, en 1542, il y a eu un traité passé entre l’Empereur d’alors et le duc, qui garantissait une sortie d’Empire. C’est-à-dire que le duché de Lorraine était sorti d’Empire mais restait sous sa protection. Il y a là, tu vois, une ambiguïté un peu du statut lorrain, on est sorti mais on reste sous la protection. Donc comment on analyse, comment ça se traduit dans la pratique, c’était le but de mon mémoire…

Fanny : Et on a des liens avec le roi de France.

Jérôme : Dans le même temps on reste vassal du roi de France. On est en même temps vassal de l’empereur et à la fois vassal du roi de France. C’est donc très compliqué…

Fanny : C’est pas une position très confortable

Jérôme : Tout à fait, c’est pas confortable mais ça offre des possibles, et c’est tout l’intérêt de la guerre de Succession d’Espagne, c’est là qu’on voit justement comment on va utiliser de manière totalement pragmatique ces liens. Donc ta question était de savoir quels documents j’avais rajoutés, j’ai pu voir, j’ai rajouté les instructions de ce diplomate. Les instructions vous savez ce sont les ordres avec lesquels les diplomates partent en mission. Et j’ai vu en fait, j’ai commencé à comprendre qu’il y avait en fait un écart entre ce que disaient les documents contemporains de la relation entre la Lorraine et le Saint-Empire, et l’histoire qui s’écrivait au XXe siècle sur ces relations entre le duché de Lorraine et l’Empire.

Fanny : Et quelles sont les difficultés que tu as rencontrées pendant ton mémoire ?

Jérôme : Je pense que la première, les premières difficultés qu’on peut rencontrer quand on fait un mémoire, et ça c’est une difficulté commune à tous les étudiants, c’est peut-être qu’il faut apprendre à faire le deuil de l’exhaustivité. C’est-à-dire, qu’il faut savoir s’arrêter. Le problème c’est peut-être de vouloir trop en faire. J’ai aussi étudié l’entourage de ce diplomate, donc quand on regarde l’entourage d’un individu, et bien il faut chercher des informations sur ces personnages, et j’ai fait tout ça pour la diète de Ratisbonne en l’occurrence, puisque cette négociation à Ratisbonne est caractérisée par une multitude de liens d’interdépendance, c’est-à-dire ce qu’on peut appeler des relations de patronage, de fidélité, de clientélisme, qui sont plus importants parfois que les liens politiques, à la diète de Ratisbonne. Ça demande beaucoup de documents, puisque théoriquement pour mener à bout cette recherche, il faut une documentation sur chaque personnage, ce qui est très compliqué.

Fanny : Est-ce que tu as eu des surprises pendant tes recherches ?

Jérôme : Oui, tout à fait. La principale surprise, et qui était d’ailleurs un peu déconcertante, c’était de voir comment en fait le duc de Lorraine pouvait rester d’Empire. C’est-à-dire, je vais essayer de m’expliquer, malgré sa sortie d’Empire le duc de Lorraine cherche à rappeler son appartenance impériale. Et donc là, c’est propre en fait aux relations des souverains dans l’Europe, et notamment dans le Saint-Empire. Je prends un autre exemple pour essayer d’éclairer : on peut voir par exemple qu’un souverain peut gouverner plusieurs territoires, on le sait, et notamment je vais prendre l’exemple de l’union personnelle qui a été travaillée par Sébastien Schick, en fait cette union entre le duché de Hanovre et l’Angleterre, puisque le roi d’Angleterre sera à la fois prince d’Empire. Et ça peut être des exemples qui se multiplient. C’est-à-dire que une fois qu’on possède ce double titre, en vertu de quel droit agit-on ? Agit-on pour les intérêts de la Grande-Bretagne ou agit-on pour l’intérêt du Hanovre ? Et bien c’est un peu pareil pour la Lorraine. C’est-à-dire que le duc de Lorraine possède un territoire, la Lorraine, qui reste sous la protection de l’Empire, mais est également le seigneur d’une petite seigneurie qui s’appelle la seigneurie de Nomeny, qui est toujours un petit village aujourd’hui en Lorraine, et cette seigneurie, elle, n’est pas sortie d’Empire. Donc c’est-à-dire qu’en vertu de ses droits sur la seigneurie de Nomeny, le duc de Lorraine, le duc Léopold, peut agir comme un véritable prince d’Empire. C’est-à-dire que la seigneurie de Nomeny offre, en fait, les mêmes droits que les véritables membres d’Empire. C’est-à-dire qu’en vertu de ces droits, le duc de Lorraine peut envoyer des envoyés ordinaires, des représentants ordinaires à la diète de Ratisbonne, qui eux vont voter dans les collèges, puisqu’il peut y avoir des envoyés extraordinaires qui ne votent pas dans les collèges, et donc qui ne participent pas à l’Empire. Donc avec ce double titre, à la fois le titre de seigneur de Nomeny et de duc de Lorraine… en réalité j’ai remarqué qu’il y avait comment dire, la frontière entre cette seigneurie de Nomeny et le duché de Lorraine était, dans la pratique diplomatique, tout à fait poreuse. Il n’y avait pas de distinction entre la seigneurie de Nomeny et le duché de Lorraine. C’est-à-dire que quand Léopold de Lorraine utilise son envoyé ordinaire de la seigneurie de Nomeny à la diète de Ratisbonne, il le fait pour l’intérêt de tous ses territoires. C’est en quelques sortes là que je me suis dit que la Lorraine participait, d’une manière un peu particulière, toujours à l’Empire, même si elle en était sortie. C’est-à-dire que le duc de Lorraine agissait comme un véritable prince d’Empire.

Fanny : Maintenant que tu as fini ton mémoire, Jérôme, quels sont tes projets pour la suite ?

Jérôme : L’idée c’est de continuer à travailler cette double appartenance impériale et voir si cette grille de lecture peut se reproduire sur différents espaces de l’Empire, puisqu’on sait que cette appartenance, un peu à géométrie variable, se fait pour d’autres espaces, notamment l’Italie impériale qui a été travaillée par Matthias Schnettger, ou encore le cercle de Bourgogne. Donc l’idée ça serait de continuer sur un contrat doctoral et bien sûr, pour ça il faut passer l’agrégation.

Fanny : Donc là tu vas tenter les concours de l’agrégation ?

Jérôme : C’est la partie la moins facile, un peu peut-être de la recherche…

Fanny : Ah oui, tu as bien du courage.

Jérôme : Mais ça reste passionnant. Je pense, j’espère, que préparer une agrégation est formateur.

Fanny : C’est tout ce que je te souhaite, parce que je vois que c’est très très difficile, et vraiment j’admire beaucoup les personnes qui font la préparation agrég, de voir du point de vue psychologique, et comment ça vous pousse, vraiment je te souhaite tout mon courage.

Jérôme : Merci, je te remercie beaucoup.

Fanny : Pour finir cet épisode, j’aime bien demander des conseils, alors c’est pas forcément pour moi, mais est-ce que tu aurais des conseils pour des personnes qui voudraient travailler sur le Saint-Empire ? Qu’est-ce qu’il faut avoir bien en tête pour travailler sur le Saint-Empire ?

Jérôme : Pour travailler sur le Saint-Empire, alors c’est un espace complexe, j’ai essayé de l’esquisser, et je pense qu’il faut, eh bien lire beaucoup, lire ce qui s’est fait avant, lire ce qu’il se fait maintenant, puisqu’on ne travaille plus sur le Saint-Empire de la même manière. C’est-à-dire qu’avant on travaillait beaucoup, on a beaucoup essayé de déterminer la nature politique du Saint-Empire, aujourd’hui on est plus sur une perspective centrée sur les acteurs, c’est-à-dire comment dans la pratique on voit ce fonctionnement du Saint-Empire. C’est un peu ce que j’ai essayé de faire, grâce à la lecture de travaux tout à fait passionnants, je pense notamment à ceux de ma directrice de recherche, mais aussi ceux de Falk Bretschneider et Christophe Duhamelle, mais il faut lire beaucoup, et il faut aussi lire l’allemand…

Fanny : Toi, tu as dû lire en allemand ?

Jérôme : Oui en effet. C’est un peu une chance quand on vient de Lorraine, on fait beaucoup d’allemand dans le secondaire, c’est soit quelque chose qu’on met à profit, soit quelque chose qu’il faut retravailler. Il faut ne pas avoir peur de l’allemand, c’est une belle langue et ne pas hésiter à se plonger dans la documentation, dans la littérature allemande, qui est, là aussi, tout à fait prolifique.

Fanny : Maintenant chers auditeurs et auditrices, vous en savez un petit peu plus sur la Lorraine, sur le Saint-Empire, sur un petit peu la guerre d’Espagne, et puis voyez aussi que c’était le bazar à cette époque-là, donc quand même merci beaucoup Jérôme Jacobé de nous avoir un peu détricoté tout ça.

Jérôme : Merci à toi, Fanny.

Fanny : Retrouvez Passion Modernistes sur le site passionmedievistes.fr où vous retrouvez plein d’autres podcasts sur l’histoire, et même il paraît sur le Moyen Âge ! Et vous pouvez aussi retrouvez Passion Modernistes si ça vous intéresse d’en savoir un petit peu plus sur les prochains épisodes ou sur les épisodes à venir, sur Facebook et Twitter, et bien sûr sur toutes les applications de podcast quelle que soit celle que vous utilisez. D’ailleurs, dites-moi celle que vous utilisez, je suis un peu curieuse de savoir ça, et je vous dis à très bientôt pour un prochain épisode. Salut !

Merci énormément à Marion et Bobu pour la retranscription !

Ce très beau générique a été réalisé par Julien Baldacchino (des podcasts Stockholm Sardou, Radio Michel, Bulle d’art…) et par Clément Nouguier (du podcast Au Sommaire Ce Soir), merci beaucoup à eux !