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Épisode 31 – Yannick et Jacques II de Bourbon

Qui était Jacques II de Bourbon, prince de sang et roi de Sicile (mais pas longtemps) ?

Jacques II de Bourbon imaginé par l'illustratrice Din
Jacques II de Bourbon imaginé par l’illustratrice Din

Sous la direction du professeur Bertrand Schnerb, Yannick Daval a travaillé sur un prince de la fin du Moyen Âge, Jacques II de Bourbon, roi de Sicile, comte de la Marche et de Castres (v. 1380-1438). Ce personnage, inconnu en dehors de quelques médiévistes et érudits, a eu une vie passionnante et rocambolesque, mais au delà des évènements sa personnalité, ses comportements, son entourage sont également passionnants.

Le monde princier du royaume de France est assez bien étudié, toutefois l’historiographie a surtout porté son attention aux grands princes, duc de Bourgogne ou duc d’Orléans entre autres. L’intérêt du comte de la Marche est d’être un « petit » prince du sang issu d’une banche cadette, ce qui n’a pas freiné ses ambitions, permettant de voir le monde princier sous un angle un peu différent tout en mettant la lumière sur un haut personnage et son entourage alors qu’ils n’avaient pas reçu beaucoup d’attention jusque là.

La chronologie de la vie de Jacques II de Bourbon

  • 1380 v. : naissance de Jacques II de Bourbon.
  • 1393 : † Jean de Bourbon, son père, hérite du comté de La Marche.
  • 1396 : croisade de Nicopolis : adoubement par Sigismond roi de Hongrie, fait prisonnier lors de la bataille de Nicopolis avec d’autres grands seigneurs (Jean comte de Nevers, etc)
  • 1397 : libération contre rançon, voyage de retour.
  • 1398 : arrivée en France, accompagne Jean comte de Nevers dans sa tournée triomphale des villes flamandes.
  • 1400-1403 : part combattre en Italie pour Louis II d’Anjou qui a des prétentions sur le trône de Sicile.
  • 1404 : dirige une expédition armée en Angleterre.

    Arbre généalogique simplifié de Jacques II de Bourbon
    Arbre généalogique simplifié de Jacques II de Bourbon
  • 1406 : épouse à Pampelune Béatrix de Navarre, fille de Charles III de Navarre.
  • 1407 :
    • naissance de sa fille Eléonore, mais Béatrix décède peu de temps après.
    • participe à une campagne contre le royaume de Grenade.
    • commande une expédition armée au nom de Louis II d’Anjou pour aider Maria d’Enghien assiégée dans Tarente.
Yannick Daval
Yannick Daval
  • 1409 :
    • présent lors de la paix de Chartres.
    • nommé avec son frère Louis comte de Vendôme et le comte de Saint-Pol à la tête d’une commission pour réformer les finances royales.
    • combat avec le duc de Bourbon contre Amée de Viry.
  • 1410 : sert à plusieurs reprises d’ambassade entre Jean sans Peur et la coalition de nobles autour de Jean de Berry.
  • 1411 : combat au côté des Bourguignon à Saint-Cloud puis dirige la campagne en Beauce où il est capturé.
  • 1412 :
    • † en avril de Catherine de Vendôme, sa mère, hérite du comté de Castres.
    • libéré notamment grâce à l’aide du duc de Berry, participe à la paix d’Auxerre.
    • lutte contre son frère, Louis comte de Vendôme.
  • 1413 : libère son frère et participe à une campagne avec le duc de Bourbon en Guyenne, prise de Soubise.
  • 1414 : rejoint l’armée royale contre Jean sans peur qui se termine lors du siège d’Arras.
  • 1415 : se rend en Italie épouser la reine de Sicile Jeanne II de Naples.
  • 1416 : révoltes de nobles du royaume de Sicile.
  • 1417-1419 : emprisonné par sa femme, la reine de Sicile.

    Jacques II et Jeanne II, Chapelle de Vendôme, Cathédrale de Chartres, vers 1416)
    Jacques II et Jeanne II, Chapelle de Vendôme, Cathédrale de Chartres, vers 1416)
  • 1419-1420 : libéré, il se rend à Tarente puis obligé de se retirer de la ville des Pouilles.
  • 1421-1422 (v.) : retour en France.
  • 1424 :
    • mariage de sa fille Eléonore avec Bernard d’Armagnac, comte de Pardiac.
    • nommé lieutenant général en Languedoc (entre mars 1424 et janvier 1425)
  • 1427 : participe à la rébellion des princes contre le favori de Charles VII, George de La Trémoille.
  • 1435 : rédige son dernier testament et se retire du monde à Besançon dans le Tiers-Ordre franciscain.
  • 1438 : † du roi Jacques à Besançon où il est enterré dans la chapelle du couvent des Clarisses.

Pour en savoir plus sur Jacques II de Bourbon, Yannick vous conseille de lire les ouvrages suivants :

  • AUTRAND (F.), Jean de Berry : l’art et le pouvoir, Paris, Fayard, 2000.
  • CONTAMINE (P.), La Guerre au Moyen Âge, Paris, PUF, 2006 (6e édition)
  • MASSON (C.), Des guerres en Italie avant les guerres d’Italie: les entreprises militaires françaises dans la péninsule à l’époque du Grand Schisme d’Occident, Rome, Ecole française de Rome, 2014
  • MATTEONI (O.), Servir le prince: les officiers des ducs de Bourbon à la fin du Moyen Âge (1356-1523), Paris, Publication de la Sorbonne, 1998.
  • MINOIS (G.), La Guerre de Cent Ans: Naissance de deux nations, Paris, Perrin, 2008.
  • SCHNERB (B.), Jean sans Peur : le prince meurtrier, Paris, Payot, 2005.
  • Id., Les Armagnacs et les Bourguignons: la maudite guerre (1407-1435), Paris, Perrin, 2001.
  • TROUBAT (O.), La Guerre de Cent Ans et le prince chevalier, le « bon duc » Louis II de Bourbon (1337-1410), 2 vol., Montluçon, Cercle d’archéologie de Montluçon et de la région, 2001-1003.

Dans l’épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :

  • Kaamelott, Livre IV, Dagonet et le Cadastre
  • Le Nom de la Rose – Jean-Jacques Annaud (1986)

Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :

Transcription de l’épisode 31 (cliquez pour dérouler)

Générique]

Fanny Cohen Moreau : Est-ce que vous savez tout du Moyen Âge ? Est-ce qu’il vous reste encore des choses à découvrir ? Et d’abord, qu’est-ce que le Moyen Âge ? En fait, il y a autant de réponses que de médiévistes. Vous commencez à le savoir, mais dans ce podcast, nous rencontrons des personnes qui étudient l’histoire médiévale. Ils vous parlent de leur sujet passionnant et de leurs recherches pour que vous en sachiez plus sur cette belle période de plus de 1000 ans.

Épisode 31 : Yannick et Jacques II de Bourbon, c’est parti !

[Fin générique]

Fanny Cohen Moreau : Bonjour Yannick Daval !

Yannick Daval : Bonjour !

Fanny Cohen Moreau : En juin 2018, tu as présenté un mémoire d’histoire médiévale, donc, à l’université de Lille, sous la direction de Bertrand Schnerb, sur un certain Jacques II de Bourbon qui fut roi de Sicile vers la fin du Moyen Âge. Donc, aujourd’hui dans cet épisode, tu vas nous raconter un petit peu qui il était. Les auditeurs ont déjà entendu parler des princes de Bourbon… mais si ! Rappelez-vous ! Dans l’épisode 16. Marie-Lise vous parlait des bâtards de cette famille princière de la fin du Moyen Âge.

On va commencer Yannick ! Qui était ce Jacques ? Et en fait, surtout et avant tout, dans quel contexte naît Jacques II de Bourbon ?

Yannick Daval : Alors, Jacques II de Bourbon c’est un prince. C’est un prince du sang. Donc, comme on l’avait vu déjà avec Marie-Lise, et bien les princes du sang, ce sont en fait des membres de la famille royale. Dans le cas de Jacques II de Bourbon, et plus généralement de ceux qu’on appelle les Bourbon de la Marche, ils sont une branche cadette des ducs de Bourbon et donc, comme eux, remontent jusqu’à Saint-Louis, et plus précisément un des fils de Saint-Louis, Robert de Clermont. Il naît dans une famille des Bourbon de la Marche. Son père s’appelle Jean de Bourbon, comte de la Marche et sa mère s’appelle Catherine de Vendôme. C’est l’aîné d’une fratrie de pas moins de 6 enfants…

Fanny Cohen Moreau : … Ah oui !!!

Yannick Daval : … et oui… Alors, il avait aussi 2 frères : Louis, comte de Vendôme. Alors un personnage assez intéressant dans le sens que c’est l’ancêtre d’Henri IV…

Fanny Cohen Moreau : … Ah oui ???

Yannick Daval : … c’est par ce Louis de Bourbon, comte de Vendôme, puis par la suite, ses enfants, bien sûr, que Henri IV peut remonter ensuite aux Bourbon et donc à Saint-Louis !

Fanny Cohen Moreau : … d’accord…

Yannick Daval : Ensuite, on a un autre frère qui s’appelle Jean, seigneur de Carency, c’est un petit prince qui est possessionné dans l’Artois. Et ensuite, il y a 3 sœurs : alors l’aînée s’appelle Anne, ensuite Charlotte et la petite dernière s’appelle Marie.

Le contexte de la naissance de Jacques de Bourbon : alors on n’a pas la date exacte de sa naissance, mais il est né vers 1380. A ce moment-là, le royaume de France, on est toujours dans la guerre de Cent Ans, mais on rentre dans une phase, on va dire de calme. C’est-à-dire, les combats sont assez limités et il y a même des trêves à partir des années 1390. Donc, c’est plutôt un royaume de France qui retrouve une certaine prospérité on va dire.

Fanny Cohen Moreau : D’ailleurs, sur le contexte, dans l’épisode 29, on parlait déjà un petit peu de cette période-là. Donc, auditeurs, normalement, vous n’êtes pas trop perdus si vous avez bien suivi ! Je compte sur vous…

Yannick Daval : Dans ces années-là, le roi c’est Charles VI. On le connaît sous le nom du Roi fou. Il est assez intéressant, dans le sens que, au début, on va dire, il va bien, enfin, les premières années de son règne. Et il va commencer à faire une première crise de folie en 1392. Et au début, en fait, sa folie est, on va dire, légère et en fait, cette folie par contre va s’accentuer. Le roi, en gros, ne peut pas gouverner et il va y avoir une querelle entre les princes pour avoir le gouvernement. Et elle va se finir par la fameuse guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons. Dont, notre personnage, Jacques II de Bourbon, aura un petit rôle.

Fanny Cohen Moreau : Quel est son parcours à Jacques II de Bourbon ?

Yannick Daval : Déjà, à l’époque médiévale, on devient adulte, d’un point de vue légal, en principe, enfin généralement, à l’âge de 14 ans.

Fanny Cohen Moreau : Ah oui ! C’est tôt quand-même…

Yannick Daval : C’est assez tôt. Et donc dans cette période un peu charnière entre l’âge de l’enfant et de l’homme, il y a quelque chose de très intéressant de Jacques II de Bourbon, c’est qu’il participe à une croisade. Il participe à la croisade de Nicopolis. Elle a lieu en 1396. C’est pas la plus connue des croisades puisque ce n’est pas une des grandes croisades du XIème / XIIème siècle. C’est une croisade tardive. Elle a lieu en 1396, elle est dirigée par Jean, comte de Nevers, le futur Jean sans Peur. Elle a pour objectif de contrer les Ottomans qui sont alors en pleine expansion dans les Balkans et qui menacent, notamment, la Hongrie. Et le roi de Hongrie a alors demandé de l’aide aux autres royaumes occidentaux, notamment la France, qui a répondu favorablement. Ce qui est vraiment intéressant du coup, c’est que pendant cette croisade, Jacques II de Bourbon qui a alors environ 16 ans, va être d’abord adoubé par le roi de Hongrie lui-même, ce qui est, si on se remet dans la peau d’un homme médiéval, d’un prince, se faire adouber par un roi, c’est vraiment un honneur incroyable…

Fanny Cohen Moreau : Oui ! C’est pas commun quand-même !

Yannick Daval : Oui, c’est vraiment une sorte de grand prestige. Donc, durant cette campagne, elle va mal se finir, puisqu’il y a la bataille de Nicopolis qui se déroule en septembre et les croisés sont complètement défaits…

Fanny Cohen Moreau : … par les Ottomans…

Yannick Daval : … exactement ! Et notre personnage va être captif avec, notamment, le futur Jean sans Peur, pendant plusieurs mois, avant d’être libéré contre une forte rançon. Donc, ces personnages reviennent en royaume de France dans le courant de l’année 1398 et ils sont auréolés d’un immense prestige parce qu’ils avaient combattu pour leur foi.

Fanny Cohen Moreau : Mais, ils avaient raté…

Yannick Daval : Oui, mais, ils avaient combattu !

Fanny Cohen Moreau : Quand-même… Ca suffit en fait ?

Yannick Daval : Et ça suffit en fait. Cet acte de foi, de combattre pour sa foi, se mettre en danger, et d’ailleurs, de nombreux nobles ont perdu la vie lors de cette expédition, et bien, c’est une source de grand prestige, même si elle a échoué assez lamentablement. Après ce retour dans le royaume de France, le comte de la Marche va avoir une vie de prince assez normale, vivre à la Cour à Paris. Ensuite, on va le retrouver à la guerre. Alors, ce qui va être assez important pour la suite, c’est que dans les années, entre 1400 et 1403, il part combattre en Italie pour Louis II d’Anjou qui a alors des prétentions sur le royaume de Sicile. Et donc, il va faire un petit tour en Italie pendant quelque temps, combattre pour ce prince. Ensuite, à son retour, encore une fois il va vivre à la Cour, il va vivre sa vie de prince, on va dire, il va participer au gouvernement dans les conseils du roi et il va notamment combattre les Anglais en 1404. Là encore, c’est plutôt un échec… Dans les années 1400, il y a un noble gallois qui se révolte contre le roi d’Angleterre, Owen Glendower. Et le roi d’Angleterre alors c’est Henri IV qui a usurpé le trône à Richard II qui est un des personnages de Shakespeare. Et en fait, ce noble de Galles va demander de l’aide aux ennemis de l’Angleterre…

Fanny Cohen Moreau : … les Français !

Yannick Daval : Exactement ! (rires Fanny). Et donc, il va y avoir des traités d’alliance notamment, et le roi de France va décider d’envoyer des troupes en Galles pour aller aider, du coup, ce noble. Et c’est Jacques II de Bourbon qui va être nommé pour prendre la tête de cette armée.

Fanny Cohen Moreau : Donc là, il est déjà allé en Hongrie, il est allé en Sicile et maintenant il se retrouve en Galles… OK ! Il a beaucoup voyagé !

Yannick Daval : C’est ça ! Et il a à peine, enfin environ, 24 ans alors ! Il va être choisi pour mener cette expédition, une belle expédition, une armée d’environ 2000 hommes à peu près, sauf que ça ne va pas vraiment bien se passer.

Fanny Cohen Moreau : Encore !

Yannick Daval : Et oui… Alors, c’est-à-dire que… donc, l’armée doit se réunir en Bretagne à l’été pour être conduite au pays de Galles, mais en fait le prince ne vient pas. Il reste à Paris.

Fanny Cohen Moreau : Il boude.

Yannick Daval : On ne sait pas exactement ce qu’il s’est passé… (rires Fanny). Alors, on a une source, c’est le religieux de Saint-Denis, c’est un chroniqueur, qui nous rapporte comme quoi le prince est resté à Paris pour jouir de la vie, jouer aux jeux par exemple, faire la fête. Moi, je ne suis pas tout-à-fait sûr de ça.

Fanny Cohen Moreau : Pourquoi ?

Yannick Daval : En fait, le problème c’est que la seule source qu’on ait pour expliquer l’absence du comte de la Marche, c’est le religieux de Saint-Denis qui dit simplement, avec des termes assez durs, que le prince préfère rester à Paris pour faire la fête. Je pense plutôt qu’en fait, en avril 1404, le duc de Bourgogne Philippe le Hardi est mort et c’est Jean sans Peur qui va devenir duc de Bourgogne. Et donc l’expédition, comme je disais, elle est programmée pour l’été. Et en fait, je pense que Jacques II de Bourbon a pris du retard (enfin, parce qu’il y est quand-même allé en novembre) mais a pris du retard pour, en fait, aider le duc de Bourgogne, parce que, pour le duc de Bourgogne, ce n’est pas du tout dans les intérêts de combattre les Anglais. A cause de ses possessions en Flandres, il avait des relations économiques assez importantes avec l’Angleterre. En fait, ce n’est qu’une théorie, je n’ai aucune source qui me permet de l’affirmer. C’est seulement une théorie que j’ai, moi, parce que je n’arrive pas à comprendre, pour un prince qui a combattu, enfin, qu’on voit combattre depuis le début, que d’un coup, il n’y aille pas alors que, enfin, la quête de la gloire des armes, c’est ce qu’on voit de lui depuis le début. Et d’un coup, il s’y refuse… Il y a quelque chose qui cloche… Et du coup, voilà, j’ai développé cette théorie mais je n’ai pas de source.

Fanny Cohen Moreau : Est-ce qu’il va aider les Gallois ou pas finalement ?

Yannick Daval : Il prend du retard en fait, il arrive seulement en novembre mais en novembre, la météo ne permet pas, en fait, de naviguer sereinement à travers la Manche. Alors en fait, ils vont juste faire une petite expédition sur les côtes anglaises et ils vont revenir. Donc, tout l’argent dépensé pour cette armée, belle armée, en fait n’a servi à rien.

Fanny Cohen Moreau : Ah oui ! C’est pas top ça !

Yannick Daval : Voilà ! Et l’autre point qui me fait dire d’ailleurs aussi que c’est volontaire qu’il n’y soit pas allé, enfin que ce soit probablement politique, c’est qu’en fait à son retour, et ben, il n’a pas vraiment de problème. On le retrouve à la Cour, il ne semble pas avoir été disgracié.

Fanny Cohen Moreau : Là, quand il revient à la Cour, il a quoi ? Il a 25 ans ? Il en est où dans sa vie à ce moment-là ?

Yannick Daval : Il va attaquer une période assez intéressante de sa vie, il va bientôt se marier !

Fanny Cohen Moreau : Il serait temps quand-même !

Yannick Daval : Et oui ! Et un premier mariage, un très beau mariage même, il va se marier avec la fille du roi de Navarre.

Fanny Cohen Moreau : Oh !

Yannick Daval : Donc, le roi de Navarre, c’est Charles III et sa fille s’appelle Béatrice. Alors le traité est en 1405 et le mariage a lieu en 1406. C’est vraiment un très beau mariage ! C’est quand-même la fille d’un prince d’un rang social plus élevé. En 1406, donc, il se rend en Navarre pour épouser la princesse et ensuite, on ne sait pas trop ce qu’il fait, mais on sait par exemple qu’il va combattre du côté de Grenade.

Fanny Cohen Moreau : Comme s’il allait combattre pour son nouveau beau-père ?

Yannick Daval : Je dirais plutôt qu’il va combattre pour sa foi, en fait.

Fanny Cohen Moreau : Encore !

Yannick Daval : Et oui… Je pense que c’est encore dans cette idée de croisade, en fait, qu’il va combattre les Musulmans qui sont encore à Grenade à ce moment-là. Et en fait, il va revenir dans le royaume de France en 1408. Alors, 1408, ça commence à barder entre les princes. En 1407, Jean sans Peur assassine, fait assassiner plutôt, Louis d’Orléans. A partir de là, ça va aller de mal en pire et du coup, Charles III de Navarre et Jacques II de Bourbon reviennent sur Paris pour aider à régler, du coup, les affaires du royaume qui vont mal. Jacques II de Bourbon va avoir un rôle assez intéressant pendant ce conflit entre les princes, c’est qu’il va servir à plusieurs reprises de relais en fait, pour apaiser la situation.

[Extrait : Kaamelott, Livre IV, Dagonet et le Cadastre]

Fanny Cohen Moreau : Une fois cette période de troubles passée, qu’est-ce qu’il devient ?

Yannick Daval : Et bien, en 1415, on re-rentre dans une nouvelle période de calme dans le conflit entre les princes et c’est à ce moment-là qu’il y a un évènement assez important qui va arriver. Une nouvelle vient d’Italie : c’est que la reine de Sicile, Jeanne II, cherche à se marier.

Fanny Cohen Moreau : Ah, ah !

Yannick Daval : Et donc, elle a envoyé des ambassades à travers l’Europe pour trouver un bon parti.

Fanny Cohen Moreau : Et donc, il est intéressé ?

Yannick Daval : Et donc, il est très intéressé…

Fanny Cohen Moreau : … mais il est marié…

Yannick Daval : Non !

Fanny Cohen Moreau : Ah !

Yannick Daval : En fait, il est veuf depuis, déjà, quelques années.

Fanny Cohen Moreau : Ah bon !

Yannick Daval : Oui ! Malheureusement, Béatrice est morte quelques mois après avoir donné naissance à leur fille en 1407…

Fanny Cohen Moreau : Ah, c’est ballot !

Yannick Daval : Et du coup, il est veuf, donc il est libre.

Fanny Cohen Moreau : Ah, ah… Et il est un parti intéressant !

Yannick Daval : Un très très beau parti même ! En 1415, du coup, il répond favorablement à cette ambassade.

Fanny Cohen Moreau : Mais, il était le seul candidat ou il y avait d’autres candidats possibles ?

Yannick Daval : Alors non, il y avait plusieurs candidats. Alors, il y avait un prince d’Aragon qui était en bonne voie même pour être le nouveau mari. Il y avait aussi un prince anglais, enfin, à peu près toutes les grandes familles princières des royaumes d’Occident ont répondu en tout cas.

Fanny Cohen Moreau : Et pourquoi c’est lui qui a été choisi ?

Yannick Daval : Il a été choisi probablement parce qu’il avait des liens avec l’Italie, déjà, puisqu’il avait combattu en Sicile pour le duc d’Anjou. Je pense que c’est sûrement l’un des éléments les plus importants du choix à ce moment-là, c’est-à-dire qu’il était connu, en fait, de la noblesse italienne du royaume de Sicile. L’autre chose qui était intéressante aussi pour la reine et les nobles italiens, c’est que c’est un petit prince, c’est-à-dire qu’il n’a pas les moyens d’avoir de grandes ambitions et donc, il est malléable en fait entre les mains de la reine ou des nobles. Il ne représente pas, en fait, une menace pour eux puisqu’il n’a pas vraiment de puissance, il n’a pas assez de ressources financières par exemple pour être une véritable menace.

Fanny Cohen Moreau : Donc, il épouse la reine de Sicile et devient roi de Sicile ?

Yannick Daval : Alors, c’est un petit peu plus compliqué… (rires Fanny). Alors, une fois que la reine a décidé que ça serait Jacques II de Bourbon qui serait son nouveau mari, il se rend en Italie. A l’origine, le contrat de mariage ne prévoyait qu’il ne serait que prince de Tarente, il ne devait pas avoir de couronne en fait.

Fanny Cohen Moreau : Pourquoi en épousant la reine de Sicile il ne pourrait pas être roi de Sicile ?

Yannick Daval : Les clauses du contrat étaient vues comme ça, il ne devait pas être roi. Je pense que c’est pour que la reine, en fait, ne puisse pas avoir de concurrents. C’est toujours dans cette vision d’avoir un prince faible, un mari faible en fait, pour qu’elle puisse continuer à gouverner. Donc, il arrive en Italie et en Italie, il va rencontrer des nobles qui se sont élevés contre la reine. La reine, à ce moment-là, elle n’est pas très bien vue par une partie de la noblesse parce qu’elle a laissé le gouvernement à un favori, mais que peu de monde aime. Et donc cette noblesse va mettre sur le trône Jacques II de Bourbon. Donc, ils arrivent finalement à Naples, ils vont se marier et ils vont écarter ce favori qui s’appelle Pandolfo Alopo, ils vont même l’exécuter…

Fanny Cohen Moreau : Ah oui, carrément….

Yannick Daval : Et une fois que le terrain est dégagé, et bien en fait, par un nouveau traité, la reine accorde les pouvoirs et la royauté à Jacques II de Bourbon.

Fanny Cohen Moreau : Donc là, ça y est ! Il est roi de Sicile !

Yannick Daval : Ça y est ! Il devient roi de Sicile et même plus que roi de Sicile avec la titulature.

Fanny Cohen Moreau : Et comment se passe son règne comme roi de Sicile ?

Yannick Daval : Et bien, un peu comme toujours, ça ne va pas vraiment bien se passer…

Fanny Cohen Moreau : Encore ?!

Yannick Daval : Et oui… Une fois qu’il est devenu roi avec ce nouveau contrat, en fait, il écarte la reine, sûrement aussi avec le support de cette même noblesse qui l’avait aidé contre le favori. Sauf que, une autre partie de la noblesse s’élève contre ce nouveau roi.

Fanny Cohen Moreau : Oui, sinon c’est pas drôle…

Yannick Daval : … surtout que les Italiens, quand il s’agit de politique et de se rebeller à cette époque, ils sont forts.

Fanny Cohen Moreau : Oui, ils sont au taquet !

Yannick Daval : Exactement. Donc, il y a des révoltes dans le royaume et ces révoltes, elles finissent par le renverser. En fait, la reine retrouve du coup le gouvernement, un nouveau contrat est passé et il redevient seulement, que prince de Tarente. Mais en fait, ça va être pire que ça, c’est-à-dire qu’il va être même enfermé par la reine en fait.

Fanny Cohen Moreau : Tout en étant encore marié avec elle ?

Yannick Daval : Oui ! Ca va rester son mari mais il va devenir son prisonnier en fait.

Fanny Cohen Moreau : Elle a l’air bizarre cette reine, quand-même !

Yannick Daval : Le terrain italien à cette époque, c’est quelque chose ! Il faut s’accrocher parce qu’entre les combats entre les princes, et aussi les combats entre les différentes factions nobles, c’est vraiment un sacré casse-tête.

Fanny Cohen Moreau : Il se retrouve enfermé par la reine de Sicile…

Yannick Daval : … exactement…

Fanny Cohen Moreau : … est-ce qu’il va réussir à s’échapper ou il va finir dans ce trou ?

Yannick Daval : Alors, il reçoit quand-même du soutien depuis la France…

Fanny Cohen Moreau : Oui ! Parce que, quand-même, voilà, il a une grosse famille derrière lui et tout ça pour le soutenir.

Yannick Daval : Exactement ! Donc, il va recevoir quand-même du support diplomatique depuis, notamment, la France mais aussi, par exemple, le roi de Navarre, son ancien beau-père. Il va finir par être libéré en 1419. Au début, il reste à Naples, donc la capitale du royaume de Sicile, sauf que, assez rapidement en fait, il s’échappe. Oui, c’est vraiment une sorte d’évasion en fait, subitement il prend un bateau et il s’en va. Il avait sûrement peur pour sa vie, parce que la sécurité ne devait pas… même s’il était libre, il représentait une certaine forme de danger pour la reine. Il avait peur pour sa vie. Alors ce qu’il va faire du coup, il va s’échapper, je ne sais pas si échapper serait le bon terme, il va fuir en tout cas et il va aller à Tarente puisqu’il est prince de Tarente. Sauf que, une fois arrivé à Tarente, et bien en fait, une noble italienne qui avait aussi des droits sur la principauté de Tarente, et bien, elle va venir le déloger de Tarente. Et du coup, il se retrouve encore une fois obligé de fuir Tarente. Alors après, il va parcourir un petit peu l’Italie pendant quelque temps et finalement, en fait, il rentre en France dans le courant de l’année 1422.

Fanny Cohen Moreau : Tout penaud… Bon, dis-moi là, une fois revenu en France, est-ce qu’il va réussir quelque chose dans sa vie ou pas à un moment ?

Yannick Daval : Et ben, toujours pas…

Fanny Cohen Moreau : Mais non ! Mais… (rires)

Yannick Daval : … oui… C’est assez romanesque comme vie… Alors, une fois en France, donc il revient en 1422, il va réussir à se réinsérer auprès du nouveau roi pendant quelque temps, mais seulement quelque temps. En 1425, il est plus ou moins écarté, une nouvelle fois, du gouvernement, et en fait, à ce moment-là, on va le retrouver surtout dans ses terres. Donc, il est aussi comte de Castres et en fait, on va le retrouver dans ses terres de Castres.

Fanny Cohen Moreau : Il comprend qu’il faut qu’il arrête d’aller ailleurs et qu’il reste chez lui.

Yannick Daval : Oui, il fait un peu du boudin je crois… (rires Fanny). Il va d’échec en échec quand-même, depuis, on va dire, le voyage en Angleterre. Il va quand-même d’échec en échec…

Fanny Cohen Moreau : … même depuis la croisade au tout début, c’était pas top quand-même !

Yannick Daval : Oui… Il l’a perdue, mais il ne la dirigeait pas et même s’il l’a perdue, il est quand même revenu avec beaucoup de gloire. Ensuite, à partir de l’Angleterre, il a quand même subi beaucoup d’échecs et donc, je crois que là, il arrive un moment où ce dernier échec, ça l’a achevé…

Fanny Cohen Moreau : Et comment est-ce qu’il finit sa vie alors ?

Yannick Daval : On a un peu du mal à trouver sa trace dans les documents, mais, pour faire simple, de 1425 à 1435, il reste dans ses terres, il s’occupe plus ou moins de ses terres et il ne fait pas grand-chose d’autre. En 1435 par contre, il va prendre une décision assez radicale, il va décider d’abandonner ses titres et il va se retirer du monde et devenir franciscain.

Fanny Cohen Moreau : Ah oui ! C’est vraiment une décision très radicale pour le coup…

Yannick Daval : … oui, alors, c’est un peu difficile de voir le cheminement parce qu’on manque de sources. C’est quelque chose qu’il faut voir quand même sur un temps assez long.

Fanny Cohen Moreau : C’était quand même un prince aîné d’une famille et il se retrouve à être prêtre… Normalement, c’est plutôt les cadets dans les familles qui sont prêtres.

Yannick Daval : Il ne devient pas prêtre, en fait. Alors, on ne sait pas exactement ce qu’il devient. Il devient franciscain mais on ne sait pas s’il rentre dans l’ordre franciscain, donc, c’est-à-dire qu’il devient religieux franciscain ou s’il rentre dans le tiers-ordre franciscain. L’ordre franciscain, il prête des vœux en fait pour devenir religieux, alors que le tiers-ordre franciscain, en fait, il reste laïc. Il y a une différence. Alors, on ne sait pas exactement dans lequel il rentre. J’aurais plutôt tendance à penser qu’il finit quand même franciscain donc, a prêté les vœux.

Fanny Cohen Moreau : Et il est où ?

Yannick Daval : La personne qui est vraiment importante dans cette fin de vie, puisqu’il meurt quand même en 1438, donc quelque temps après cette décision, c’est Colette de Corbie. C’est vraiment un nom qu’il faut retenir avec ce personnage, c’est bien elle, c’est Colette de Corbie. Cette femme, va réformer les Clarisses. Les Clarisses, c’est l’ordre féminin des franciscains. Donc, elle va se rapprocher de Jacques II de Bourbon dans les années 1420-1430, on ne sait pas trop exactement, et c’est elle qui va, en fait, avoir une grande influence sur Jacques II de Bourbon pour qu’au final, il prenne cette décision de tout quitter pour devenir franciscain ou rentrer au moins dans le tiers ordre franciscain.

Fanny Cohen Moreau : Et il finit par mourir donc dans cet ordre ?

Yannick Daval : Exactement ! Donc, en 1438, il finit par mourir donc, à ce moment-là, il est à Besançon. Il finit sa vie dans cet ordre franciscain ou dans le tiers-ordre franciscain.

[Extrait : Le Nom de la Rose, Jean-Jacques Annaud (1986)]

Fanny Cohen Moreau : Tu viens donc de nous raconter toute la vie de ce Jacques II de Bourbon, qui est, on peut le dire, c’est un petit peu un boulet… je suis désolée, mais c’est un peu un boulet quand-même…

Yannick Daval : C’est quand-même pas très gentil.

Fanny Cohen Moreau : Non ! Mais objectivement… Bon, désolée ! C’est Super Joute Royale qui m’influence (rires Yannick) de parler comme ça des personnages du Moyen Âge. Mais pourquoi tu as voulu étudier lui en particulier ?

Yannick Daval : A l’origine, je voulais étudier les comtes d’Auxerre. J’avais un intérêt en tout cas dès le début pour la noblesse. En fait, quand je suis allé voir, à la fin de la licence pour le master, mon directeur de recherche Bertrand Schnerb, il proposait aussi différents sujets. Du coup, j’ai étudié les sujets et parmi ces sujets, il y avait Jacques II de Bourbon. Je ne connaissais absolument pas. Après que mon professeur m’ait raconté rapidement sa vie, j’ai aussi fait une petite recherche et en fait, je me suis rendu compte qu’il y avait un énorme potentiel sur ce personnage, et du coup, je l’ai choisi.

Fanny Cohen Moreau : Mais pourquoi un potentiel ? Il n’a pas été beaucoup étudié ?

Yannick Daval : Exactement ! En fait, il n’y a presque rien sur ce personnage. Il y a un seul ouvrage qui date de 1890, qui a été écrit sur lui, et même cet ouvrage est dépassé en fait. C’est un ouvrage qui raconte vraiment sa vie que d’un œil évènementiel et qui s’intéresse aussi beaucoup à lui par rapport à Colette de Corbie. Donc, au final, il n’y a vraiment pas grand-chose sur lui.

Fanny Cohen Moreau : Donc, dans ton mémoire, et par rapport à tout ce que tu viens de nous raconter, qu’est-ce que tu as apporté de nouveau ?

Yannick Daval : Alors, des choses nouvelles, il y en a vraiment beaucoup ! J’ai dû dans ce travail faire un travail vraiment de rassemblement. Il a fallu chercher des sources, puisqu’il n’y avait vraiment rien à ce moment-là sur lui. Il a fallu rassembler les sources, il a fallu aussi aller chercher des informations qui étaient éparpillées un peu partout. Parce que en fait, ce personnage, il n’est pas très important, mais on le retrouve quand-même beaucoup, c’est-à-dire à travers des petites mentions dans des tas d’ouvrages, et bien, on a des petites informations et donc, une grosse partie du travail, en plus des sources, c’est aussi de rassembler ces informations pour construire mon mémoire et ma réflexion. Alors, dans les choses que j’ai découvertes qui sont très intéressantes, c’est d’abord sa date de naissance… Parce que, au début, tout le monde pensait qu’il était né vers 1370, à cause d’un généalogiste, Anselme, qui est assez connu et en fait qui avait donné, pas sa date de naissance mais son âge de mort… Ce généalogiste avait dit que Jacques II de Bourbon était mort à l’âge de 68 ans. Du coup, si on a son âge à sa mort en 1438, tout le monde a fait le rapprochement avec sa naissance, donc 1370. Mais en fait, comme on travaille sur les sources, on se rend compte qu’il n’est pas du tout né en 1370, il est né vers 1380.

Fanny Cohen Moreau : Il y a bien 10 ans de différence quoi !

Yannick Daval : Une belle différence ! Donc, c’est déjà un premier point que j’ai découvert qui est assez intéressant, puisque, comme j’avais dit, par rapport par exemple à la croisade de Nicopolis, ça change quand-même beaucoup le regard qu’on a sur cet évènement pour lui.

Fanny Cohen Moreau : Oui… il était beaucoup plus jeune que ce qu’on pensait alors…

Yannick Daval : C’est ça ! Dans les autres choses que j’ai découvertes sur lui, une des plus intéressantes aussi, ça a été de remettre en avant le lien qu’il avait avec une famille princière en particulier, c’est celle des ducs de Berry, Jean de Berry et ensuite de ses filles. En fait, jusque-là, on voyait surtout Jacques II de Bourbon par rapport à ses relations avec les ducs de Bourgogne, et bien qu’ils ont été très importants, en fait, le duc de Berry a eu, au moins, autant d’importance dans sa carrière que les ducs de Bourgogne. Et pour un dernier exemple, jusqu’à maintenant, on voyait Jacques II de Bourbon surtout pour sa piété par rapport à Colette de Corbie. En fait, sa piété est plus variée que ça. Il a fait, par exemple, des fondations dans la cathédrale d’Albi, il a fait aussi des fondations dans un monastère du comté de la Marche. Il avait encore aussi une piété assez particulière et forte pour un saint, c’est saint Antoine. J’ai aussi essayé dans mon travail, de sortir le personnage de, ce que j’appelle, la prison « colettine », c’est-à-dire qu’il était un peu enfermé dans cette image du prince qui était influencé par Colette de Corbie, sans qu’on puisse voir autre chose derrière.

Fanny Cohen Moreau : Là, tu as rendu ton mémoire il y a quelque temps, est-ce que tu aimerais faire une thèse sur lui ?

Yannick Daval : Alors, j’espère faire une thèse après, surtout que, en fait, il y a encore beaucoup de choses à faire dessus. J’ai une liste très longue de sources que je n’ai pas pu encore consulter ainsi que d’ouvrages que je n’ai pas pu encore lire. Enfin, c’est un véritable travail de thèse qui reste même à faire dessus, en fait. Je suis même assez frustré par mon mémoire, puisque avec la limite de temps de deux ans, et bien, je n’ai pas pu faire beaucoup de choses au final.

Fanny Cohen Moreau : Et là, depuis que tu as rendu ton mémoire, qu’est-ce que tu fais ?

Yannick Daval : Depuis mon mémoire, j’ai d’abord commencé par faire… rentrer dans une préparation pour passer les concours, donc une préparation à l’agrégation.

Fanny Cohen Moreau : C’est les concours de l’enseignement, donc pour devenir prof soit au lycée soit à l’université.

Yannick Daval : C’est ça ! Et donc, en fait, cette préparation ça ne s’est pas très très bien passé… En fait, j’ai simplement abandonné en cours d’année. Et du coup, là, je prépare pour la rentrée prochaine à faire un master MEEF, en fait…

Fanny Cohen Moreau : C’est quoi un master MEEF ?

Yannick Daval : Alors le master MEEF c’est un master pour préparer à devenir professeur et aussi pour passer le concours du CAPES.

Fanny Cohen Moreau : Quel bilan est-ce que tu tires de tes années de mémoire et est-ce que tu pourrais aussi nous dire, il me semble que tu as fait, en fait, d’autres études avant le master d’histoire médiévale, n’est-ce pas ?

Yannick Daval : Oui ! J’ai un parcours un petit peu particulier… C’est-à-dire que j’ai repris mes études quelques années après avoir commencé à travailler. Pour reprendre depuis le début, je n’aimais pas trop l’école en fait. Du coup, j’ai rapidement été dans des études professionnelles pour pouvoir travailler et, en fait, je me suis rendu compte que ça aussi ça ne me plaisait pas vraiment et que j’avais envie de faire, quand-même, des études. Et je ne voulais pas aller à l’école, je voulais faire des études en histoire, surtout en histoire médiévale…

Fanny Cohen Moreau : Ah… Tu avais déjà cet objectif ?

Yannick Daval : Ouais… En fait, oui. Je n’aimais pas l’école, mais comme j’adorais l’histoire, ben, j’ai toujours eu, en fait, cette petite idée au fond de ma tête de pouvoir un jour faire des études d’histoire. Et ben un jour, je me suis dit, OK, on se lance. Et du coup, j’ai repris mes études.

Fanny Cohen Moreau : Tu faisais quoi avant de reprendre tes études ?

Yannick Daval : Et bien, en fait, j’ai passé différents diplômes pour être paysagiste, après, j’ai travaillé quelque temps, j’ai travaillé un an après ça je me suis inscrit, mais comme je n’avais pas le BAC, il a fallu que je passe ce qu’on appelle un DAEU pour pouvoir ensuite aller à l’université et pouvoir m’inscrire en licence. Donc après, j’ai fait le parcours normal licence et master.

Fanny Cohen Moreau : Et ce n’était pas trop compliqué de reprendre tes études pour passer tout ça ?

Yannick Daval : Alors, si, si, ça a été très compliqué même ! Alors le DAEU, ça a été. Par contre, la licence c’était un peu plus compliqué. D’abord, il y a le fait qu’il faut réapprendre tout ce qui est méthodologie, c’est quand-même assez compliqué en fait. Je n’avais pas fait d’histoire, avant le DAEU, je n’en avais pas fait depuis la 3ème…

Fanny Cohen Moreau : En termes de connaissances, en fait, il te manquait des choses même…

Yannick Daval : C’est ça… Il a fallu que je réapprenne tout presque. Parce qu’en DAEU, on apprend les bases, mais… c’est vraiment des bases quoi… Donc, quand je suis arrivé en licence, il a vraiment fallu tout réapprendre. Ce qui était assez compliqué au début, c’est la méthodologie. Ce qui était aussi un petit peu compliqué en licence, c’est qu’à ce moment-là, j’avais 25 ans et que tous les élèves ont environ 18 ans. C’est pas toujours facile aussi de côtoyer des gens aussi jeunes quoi !

Fanny Cohen Moreau : Ben oui… Même en termes de rythme de vie, j’imagine que c’est pas facile…

Yannick Daval : Il y a un temps d’adaptation en fait. C’est surtout en licence 2 que ça a commencé à aller. Il faut dire que, à l’université, on va dire, les moins matures ont tendance à partir assez rapidement. Donc, après, entre l’adaptation et le fait que, ceux qui restent soient ceux qui sont les plus matures, on arrive après à s’intégrer.

Fanny Cohen Moreau : Donc, tu as réussi à aller jusqu’après au mémoire et au master…

Yannick Daval : C’est ça ! Du coup, alors, la première année de licence a été assez compliquée le temps d’apprendre vraiment tout ce qui est méthodologie, etc… j’ai pris quand-même quelques très mauvaises notes. Mais, une fois que le travail a été fait pour, justement, reprendre cette méthodologie, ben, tout a été très bien.

Fanny Cohen Moreau : Donc, toi tu prouves bien que dans ton parcours, même si on est, à la base, pas prédestiné à faire des études d’histoire médiévale, on peut y arriver quand-même.

Yannick Daval : Ce qui m’a motivé, ce qui m’a aidé à tenir, ça a vraiment été ma passion pour l’histoire médiévale. J’ai vraiment une addiction, même à cette période !

[Générique]

Fanny Cohen Moreau : Maintenant, chers auditeurs et auditrices, vous en savez un petit peu plus sur qui était ce personnage, un petit peu compliqué, et parfois, disons-le, un petit peu boulet… Je suis désolée Yannick, qu’était Jacques II de Bourbon. Donc, merci quand-même, Yannick Daval, de nous avoir appris tout ça sur lui.

Yannick Daval : Mais, de rien, c’était un grand plaisir pour moi.

Fanny Cohen Moreau : Et je prends quelques minutes pour vous parler du Tipeee de Passion Médiévistes. Grâce à vos dons en août, j’ai pu payer une illustratrice qui s’appelle Din, D I N, pour réaliser l’illustration de cet épisode que vous pouvez voir, avec un portrait un petit peu humoristique de Jacques II de Bourbon, comme on pourrait l’imaginer à partir de ce que vous avez pu entendre dans l’épisode.

Donc, pour ce mois d’août, je tiens à remercier particulièrement Ambroise, Daniel alias Winnie qui soutient beaucoup le podcast, Isabelle du Kremlin-Bicêtre et aussi Isabelle de Nîmes. Merci beaucoup encore pour vos dons, vraiment, ça fait plaisir. Là, en août, ça a été un petit record ! D’ailleurs, le Tipeee de Passion Médiévistes va un petit peu changer, il va y avoir des changements, notamment, dans les paliers et dans les contreparties et les sacs Passion Médiévistes arrivent bientôt. Donc, comme d’habitude, je vous dis, si vous voulez soutenir le podcast et m’encourager et recevoir des stickers, des goodies du podcast, vous pouvez contribuer au Tipeee, donc tipeee.com/passionmedievistes, à hauteur de quelques euros par mois ou alors, juste de façon ponctuelle.

Et dans le prochain épisode de Passion Médiévistes, on va parler de la restauration des sceaux du Moyen Âge.

Salut !!!

Merci à Patricia pour la transcription et à Tifenn pour la relecture !