Épisode 12 – Solenn et les Juifs d’Égypte (Passion Antiquités)
Apprenez-en plus sur la vie de familles juives à Éléphantine dans l’Egypte antique !
Dans cet épisode de Passion Antiquités, Solenn Gautier nous fait voyager en Haute Égypte au Vème siècle avant notre ère pour découvrir les familles juives d’Elephantine. Elle a soutenu son mémoire de Master 2 « La sphère familiale chez les juifs d’Éléphantine au cinquième siècle avant notre ère » à l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne sous la direction de Bernard Legras.
Elephantine au Vème siècle avant notre ère
Pour ses recherches, Solenn Gautier a travaillé sur Eléphantine, une colonie militaire située sur une petite île de haute Egypte (le sud) qui fait face à la ville de Syène, aujourd’hui appelée Assouan. Cette zone stratégique est intéressante à étudier car elle permettait notamment de surveiller la frontière avec la Nubie et de protéger la route commerciale notamment d’ivoire (d’où vient le nom Eléphantine).
Au Vème siècle avant notre ère, durant la période achéménide, les Perses dominent la région et sont aux postes de commandement d’où ils dirigent des notables égyptiens dans une paix toute relative.
L’arrivée des Juifs en Égypte
Plusieurs hypothèses existent concernant la datation de l’arrivée des Juifs en Egypte. La première concerne un contingent de mercenaires ayant été envoyé depuis le royaume de Judas au pharaon Psammétique 1er. La seconde proposition serait une arrivée lors du règne du roi Josias. Les opposants à ses réformes religieuses auraient fui le royaume de Judas vers l’Égypte. Une autre hypothèse serait un exode lors de la chute du royaume de Judas pris par les babyloniens. Dans tous les cas, les Juifs sont présents à Éléphantine au Vème siècle avant notre ère.
Les deux familles d’Eléphantine étudiées
Dans son mémoire, Solenn Gautier a étudié deux familles très différentes, mais qui avait pour point commun d’être mixtes et d’avoir des femmes qui ont laissé des archives, notamment des contrat de mariage et des actes de donations.
La première est la famille de la notable Mibṭaḥyah. Ils étaient même probablement l’une des familles les plus riches de l’île car ils possédaient des esclaves et des biens fonciers, sachant que le père de Mibṭaḥyah était militaire et que son neveu deviendra en son temps le chef de la communauté juive.
La seconde famille que Solenn Gautier retrouve dans les papyrus est celle de ‘Ananyah et de Tamut. Plutôt d’un niveau social très modeste, ‘Ananyah était le sacristain du temple de Yahô et Tamut était une esclave égyptienne dont le fils a été reconnu par ce premier, mais dont des doutes persistent sur sa parentalité.
Dans l’épisode, nous parlons aussi de la déchristianisation de la datation, de la population d’Elephantine, de mariages et de divorces, de stock onomastique, d’esclavage, de l’importance des archives personnelles dans la vie quotidienne de l’époque.
Pour en savoir plus sur le sujet de l’épisode, on vous conseille de lire :
-
Azzoni, Annalisa, « Women of Elephantine and Women in the Land of Israel », dans In the Shadows of Bezazel. Aramaic, Biblical, and Ancient Near Eastern Studies in Honor of Bezazel Porten, Leiden/Boston, Brill, 2013, p. 3-12.
- —, The Private Lives of Women in Persian Egypt, Winona Lake, Eisenbrauns, 2013.
- Becking, Bob, « Yehudite Identity in Elephantine », dans Oded Lipschit, Gary N.Knoppers et Manfred Oeming (éd.), Judah and the Judeans in the Achaemenid Period, Negotiating Identity in an International Context, Winona Lake, Eisenbrauns, 2011, p.403-419.
- —, Identity in Persian Egypt, The Fate of the Yehudite Community of Elephantine, University Park, Eisenbrauns, 2020.
- Botta, Alejandro F., The Aramaic and Egyptian Legal Traditions at Elephantine, Londres, T&T Clark, 2009, coll. « Library of Second Temple Studies ».
- Ilan, Tal, « Women’s Archives from Elephantine and the Judean Desert : Law codes and Archaeological Finds », dans Ilan Peled (éd.), Structure of Powers, Law and Gender across the ancient Near East and Beyond, Chicago, Oriental Institute of the University of Chicago, 2018, coll. « Oriental Institute Seminars », n°12, p. 171-179.
- Lipiński, Edward, « Contrats de mariage judéo-araméens du Ve siècle av. n. è. : La position juridique de l’épouse », The Biblical Anal, vol. 4, Lublin, Katolicki Uniwersytet Lubelski Jana Pawła II – Wydział Teologii, 2014, p. 9-41.
- Mélèze Modrzejewski, Joseph, Les Juifs d’Egypte. De Ramsès II à Hadrien, Paris, Armand Colin, 1991, 2e éd. Paris, Quadrige/Presse Universitaire de France, 1997.
- Nutkowicz, Hélène, Destins de Femmes à Éléphantine au Ve siècle avant notre ère, Paris, L’Harmattan, 2015, coll. « Kubaba ».
- Porten, Bezalel, et Zvi Szubin, Henri, « The Status of the Handmaiden Tamet : A New Interpretation of Kraeling 2 (TAD B3.3) », Israel Law Review, vol. 29, 1995, p. 43-64.
- Schattner-Reiner, Ursula, « La bibliothèque araméenne de la communauté juive d’Éléphantine », Tsafon Revue d’études juives du Nord, n°56, automne 2008 – hiver 2009, p. 13-27.
- Van der Toorn, Karel, Becoming Diaspora Jews, Behind the Story of Elephantine, New Haven/Londres, Yale University Press, 2019.
Les deux traductions des archives familiales utilisées :
- Grelot, Pierre, Documents araméens d’Égypte, Paris, Éd. Du Cerf, 1972, coll. « Littératures anciennes du Proche-Orient ».
- Porten, Bezalel, et Zvi Szubin, Henri, et al., The Elephantine Papyri in English, Three Millennia of Cross-Cultural Continuity and Change, Atlanta, Society of Biblical Literature, coll. « Documenta et monumenta Orientis antiqui, Studies in Near Eastern archaeology and civilisation », vol. 22, 2011.
Mais aussi :
- « Juifs d’Orient, une histoire plurimillénaire », exposition à l’Institut du Monde Arabe à Paris (24 Novembre 2021 – 13 mars 2022)
Dans cet épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :
- Egypte – Quand Assouan était Abou
- Jean-Luc Fournet, papyrologue, dans l’émission Carbone 14 « Le papyrus dans tous ses états » (Samedi 2 octobre 2021)
- Spelunky 2 – Temple Theme Extended